Afin de soutenir le contenu de ma chronique sur la nécessité de la tolérance à l’échec, je voudrais mettre l’accent sur le choix pour moi de pratiquer la cuisine intuitive et de la revendiquer haut et fort.
Lorsque j’ai choisi de faire ce blog, j’ai aussi choisi de tout faire moi-même, à savoir les textes bien sûr, mais aussi les recettes et surtout les photographies. Je n’avais jamais fait de photographies culinaires, et je m’étais encore moins considérée comme une bonne photographe jusque là, ni une photographe tout court d’ailleurs. Atteinte de « perfectionnite » aigüe depuis….à peu près toujours, j’ai non seulement nourri mon blog dans l’ombre et de façon complètement aléatoire pendant un an et demi, mais je mettais aussi (work still in progress) un temps fou à penser, préparer, rédiger mes textes, faire ma cuisine et prendre mes photos, le tout en étant bien sûr immanquablement insatisfaite du résultat. Je trouvais que mes textes traitaient de sujets d’une banalité plate, mes recettes lambda et mes photos n’en parlons pas. Mais je me suis efforcée de continuer, comme on entame une nième thérapie en se disant que, cette fois, on ne lâchera pas parce qu’on n’a jamais été vraiment au bout de quoi que ce soit, et parce que la petite voix au fond de soi nous dit : « n’abandonne pas, tu es au bon endroit, tu verras, l’aboutissement c’est le chemin, il n’y a pas de fin, sois dans ton expression, dans ta créativité propre, celle qui n’appartient qu’à toi, fais confiance à ton intuition et tu verras » etc.
Alors, j’ai continué contre vents et marées. Dans mon océan de tourments, notamment dûs à un sentiment grandissant et envahissant, submergeant, de décalage d’avec une certaine conception de la réalité que nous renvoie la société, il fallait que « pour une fois » je continue quelque chose, et ce quelque chose c’était ça, cette expression-là, cette connexion-là à ce que je perçois depuis l’enfance comme étant une autre forme de réalité, plus authentique, plus urgente et importante, essentielle, une réalité qui vient du coeur, des profondeurs, une réalité qui ne souffre pas qu’on se la raconte.
Quant à la cuisine, je prends conscience aujourd’hui que justement elle doit être imparfaite et spontanée, que cette imperfection participe précisément à ma démarche toute entière, celle qui me fait vibrer, celle qui me permet de ne pas m’arrêter, de ne pas céder à mon censeur intérieur né de mes propres croyances subjectives, entretenues, nourries depuis l’enfance, au fur et à mesure des blessures de mon ego, ravivant naturellement l’instinct de survie tapis dans nos cellules héritées des tous premiers hommes qui eux, avaient vraiment des raisons de craindre pour leur vie.
Je revendique donc farouchement l’écriture sensitive et la cuisine intuitive, comme autant d’expressions révélatrices de ma singularité, les seules qui comptent vraiment (pour moi, car chacun les siennes trouvera) et dont il nous faut nous armer en réponse à la folie du monde…